Le jour de Noel, mon fils de 6 ans déballe avec enthousiasme le cadeau offert par sa grand-maman via la web cam! C’est le visage déconfit qu’il découvre, au creux de la boîte, une paire de pantoufles « tricotée avec amour », comme dirait Mémé.
À mon grand désarroi, mon malaise s’amplifie quand il s’écrie :
« Ce n’est pas ça que je voulais! C’est pas beau! C’est trop nul ! »
C’est alors que j’insiste :
« Arrête ton niaisage et excuse-toi! Le Père Noel ne te donnera pas tes autres cadeaux si tu n’arrêtes pas tout de suite! C’est impoli! »
Toujours pas d’excuses et une paire de pantoufles qui traîne au fond d’une boîte avec un malaise en prime! Misère… Comment on gère ça?
Solutions
Comme parent, je développe le réflexe de me poser les bonnes questions:
Quel est mon but? Le faire sentir coupable? Lui démontrer à quel point il est impoli?
Mon but serait plutôt que mon enfant apprenne à s’exprimer sans blesser. Qu’il ait de la gratitude et qu’il soit sensible aux autres.
- Peut-il développer sa sensibilité si je suis insensible à lui?
- Peut-il se soucier du ressenti des autres si on ne se soucie pas du sien?
- A-t-il le droit d’être déçu?
Rappelons-nous que l’enfant vit dans le moment présent. Ses réactions sont souvent spontanées et irréfléchies. Dans le meilleur des mondes, je peux d’abord faire de la prévention en ayant une discussion avec mon enfant avant le fameux jour de Noël. On peut explorer avec lui différentes mises en situation sous forme de jeu, le soir, par exemple, avant le dodo. On développe ainsi son empathie en passant par son ressenti.
J’invite mon enfant à se mettre dans la peau de celui qui donne.
- À qui voudrais-tu donner un cadeau?”
- Que lui donnerais-tu?
- Comment tu te sentirais s’il était fou de joie?
- Et s’il était déçu et te disait qu’il n’aime pas ton cadeau? Ça te ferait quoi dans ton cœur? Aurais-tu envie de lui redonner à nouveau?
- Et imagine qu’on te donne un cadeau, exactement ce dont tu rêvais. Que pourrais-tu dire à celui qui te l’a offert?
- Et si tu déteste le cadeau, que peux-tu dire?
Si on revient à la situation initiale, comment réagir? En fait, il faut plutôt agir au lieu de réagir! Si je me sens tendue (ce qui risque d’arriver!), je prends un temps d’arrêt (quelques secondes) pour faire un pas de recul. Ce délai, aussi minime soit-il, me permet d’éviter d’envenimer la situation et de me recentrer sur mon but :
Élever mon enfant
C’est-à-dire le faire progresser au niveau de l’empathie et de l’expression de soi
1.Je peux lui offrir un modèle en reformulant ce qu’il tente de dire :
« Ce que tu veux dire, c’est que tu es déçu. Tu aurais préféré autre chose… » Je peux me charger de remercier grand-maman moi-même et lui mentionner que nous allons la rappeler quand nous serons plus calmes. » La majorité d’entre nous tentons de corriger nos enfants sur le moment alors qu’ils ne sont pas réceptifs, sous l’emprise de l’émotion. Ils ne peuvent pas RAISONNER (raison) car ils RÉSONNENT (émotion).
2. J’écoute ce que mon enfant ressent. Ses émotions sont légitimes et bien réelles alors je les accueille. Ex. : « J’entends que tu es déçu. Si tu avais pu choisir, tu aurais voulu autre chose… »
Je peux normaliser ses émotions de déception et partager mon vécu si j’ai déjà expérimenté une situation semblable : « Quand on reçoit une surprise, ça peut arriver d’être déçu parce qu’on avait imaginé autre chose. Moi aussi, quand j’étais petite… » L’enfant se sent alors compris et ne se sent plus seul. De plus, en lui retirant son sentiment de culpabilité, il peut mettre son énergie sur autre chose, comme « récupérer » avec grand-maman par exemple. C’est seulement lorsqu’il se sera senti compris, je pourrai me permettre de revenir sur la manière dont il s’est exprimé en lui révélant l’impact que cela a pu avoir sur sa grand-maman. Cette étape ne doit pas se faire sous forme de sermon ou dans la culpabilité mais avec un ton calme et neutre. Il sera ainsi beaucoup plus ouvert.
3. Nous voyons ensemble ce qu’il aurait pu dire ou faire à la place.
Tu aurais pu simplement lui dire « merci » et me confier ta déception à moi seule par la suite. Ainsi, ça permet à l’enfantd de vivre son émotion sans blesser sa grand-mère.
4. Récupérer
Comme le respect est une valeur importante, il est primordial de « récupérer » auprès de grand-maman. J’accompagne mon enfant dans cette étape pour que celle-ci se vive avec le moins de culpabilité possible. On fait un retour avec grand-maman et on peut accompagner le tout d’un dessin, d’un commentaire positif sur son cadeau… Pour récupérer par rapport à une situation, voici 4 étapes :
- Je reconnais mon erreur : Je m’excuse d’avoir dit que ton cadeau est nul.
- J’explique : J’avais imaginé autre chose dans ma tête et j’ai été déçu sur le moment.
- Je reflète l’émotion de l’autre : Tu devais être triste.
- Je présente un nouveau modèle : La prochaine fois, je te dirai merci car tu as voulu me faire plaisir et c’est ça l’important.
Si l’enfant est mal à l’aise ou trop timide pour faire cette étape en personne, on peut lui proposer de s’excuser en faisant un petit vidéo ou on peut l’écrire dans une carte. L’important est le processus réflexif et le temps investi. Un simple : « Je m’excuse » est vide de sens et est trop vite fait, ce qui n’a pas le même impact.
Alors finit les malaises et l’appréhension des crises lorsqu’on déballe les cadeaux en famille. On détient maintenant un mode d’emploi efficace pour préserver la magie de Noël tout en offrant en prime un réel cadeau à notre enfant : l’empathie et la gratitude. Et grand-maman peut continuer de tricoter pour réchauffer nos pieds…et nos cœurs !
Émilie Vincent
Formatrice et copropriétaire de Les Formations COMMEUNIQUE